eDEN
FANZINE HOUSE
eDEN ET LES GARÇONS
NUMÉRO6 JUIL/AOÛT 93
10 FRANCSBEAUTÉ
ZARMA!
eDEN est édité par le COLLECTIF eDEN : 171 rue Lafayette 75010 PARIS.
DIRECTION ARTISTIQUE : Michaël Amzalag @ M/M.COLLABORATEURS : Cécile Alizon, Jean-François Baum, Emmanuel Bérard, Vincent Borel, Tom & Jerry Bouthier, Christophe Cloiseau, Adelaide Dugdale, David Fonteyne, Gitte, Éric Grosjean, Duncan Jouvence, Judith, Tante Julia, Koja, Dr La Champi, Philippe Laugier, Sylvain "Le Gland" Legrand, Didier Lestrade, Christophe "Widowsky" Monier, Serge Nicolas, Fabrice Oko-Osi, Serge "Therapy" Papo, Jérôme Péries, Tétu Posse, Titi, Patrick Vidal. COORDINATION : Christophe Vix. PHOTOGRAPHES : Pierre Andréotti, Christophe Desmoulin, Nicolas Foucher. IMPRIMERIE : Schaffer. (c) eDEN 1993 Reproduction interdite. PHOTO COUV : Nicolas Foucher, RETOUCHE : Michaël.
VOYAGES
Nº 6 Juil/Août 93ÉDITO/5
PROVINCE/7
CASTORAMA/27
JUNGLE/30
DAVINA/32
FEMMES.../36
ON S'EMMERDE !/40
...UN MARTEAU/45
PHARMACIE/50
STYLE ?/62
LABELS/68
LEVI ACTION SLAX/74
DJs/81
SKEUDS/88
La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, celles-ci n'engageant que leurs auteurs.
INTERVUE
DAVINA
« QUEL EST TON BACKGROUND MUSICAL ? D'OÙ VIENS-TU ?
Mes cousins étaient déjà dans la musique puisque c'était l'équipe qui composait pour DIANA ROSS, MARVIN GAYE et les JACKSON 5. Detroit history. À la base je viens du R&B, mais j'écoutais beaucoup de hard rock étant plus jeune. J'ai donc raté quelques trucs dans la dance, entre autres la disco, car j'étais dans le camp "disco sucks". Puis je suis sortie dans les boîtes homo et c'est là que j'ai découvert la house. Je connais Mad Mike de UNDERGROUND RESISTANCE depuis longtemps car sa mère était ma prof au collège. Ce qu'il fait avec UR a toujours été trop dur, trop industriel pour moi. Quand il a commencé Happy Records avec un des musiciens de UR, il voulait + de vocaux et des morceaux + house garage. Moi j'ai toujours aimé la house avec du groove et de la soul. Il m'a demandé de participer au label. J'ai fait les claviers, composé une mélodie, chanté et voilà, c'est Don't You Want It. Autrement pour les autres artistes, Yolanda etc., c'est Mike qui compose. Avant Happy j'ai écrit pas mal de titres de R&B pour Sony. J'ai aussi produit du rap, plein de choses. Mais ce qui m'a donné envie d'être une artiste c'est vraiment la house. J'aime les clubs, surtout les clubs gays ; les straights ne savent pas vraiment groover !
Y A-T-IL DES LIENS ENTRE DÉTROIT, CHICAGO, NEW YORK ?
Avec le house sound de Chicago, oui. Mais avec NY très peu. La scène new-yorkaise est bizarre ; ils ont leurs trucs très particuliers. De plus les gens de la scène techno de Détroit n'aiment pas l'idée de sortir de la ville ; tout doit rester à Détroit. Le fait de licencier des disques, de s'expatrier en quelque sorte, c'est tabou pour eux. Ils ont une profonde mentalité underground. Mais je veux être capable d'avoir une plus grande ouverture d'esprit car je crois vraiment que tu peux garder le feeling underground où que tu sois, quoique tu fasses, quelle que soit la structure. Tu ne m'entendras jamais chanter une chanson genre WHITNEY HOUSTON sur un label house. Je veux rester proche de la vibe underground, mais pas de la mentalité merde-à-tout-le-monde. Je suis plutôt soft en fait.
ET TES PROJETS ?
Je viens de créer mon label, Nocturnal Images, sur les conseils de Mad Mike où je suis productrice et ingénieur du son. J'ai sorti dessus le 2e maxi, Let It Be Me. C'est un label purement house. Je ne vais pas mélanger les genres. Je donne mes compositions R&B à d'autres artistes ; et j'ai aussi des productions rap sur un autre label. Dans la house, tu peux faire ce que tu veux, être qui tu veux, c'est la liberté. C'est ce que j'aime dans cette musique. »
Happy, c'est ce qui se dégage de cette petite bonne femme, jolie, souriante, pas star pour 2 secondes. La suite sur son label !
PATRICK VIDAL
TRIBUNE
Le plus grand tabou de la scène house est d'avouer, de temps en temps, qu'... ON S'EMMERDE
Qu'on n'a pas envie de sortir. Que rien n'est là pour nous traîner dehors. Que les trois dernières nuits passées dehors étaient vraiment merdiques. C'est une chose impossible à dire parce qu'on passe soit pour un vieux raver blasé, soit pour rabat-joie avec un mauvais sens du timing. Mais je ne vois pas pourquoi j'aurais des scrupules : j'ai de plus en plus de mal à m'amuser dans des clubs ou des raves. Au lieu de rassembler et d'exalter des esprits libres, les clubs semblent concentrer toutes les frustrations de la scène house. C'est l'apologie de la confrontation et des clans. On défend un style de house par rapport à un autre. On en arrive au comble du snobisme quand les puristes hardcore mettent aux nues Sven Väth, qui est peut-être génial mais qui a été, il faudrait quand même le rappeler, Electric Salsa. On est en pleine science-fiction analphabète quand on entend des gosses - qui ne savent rien - dire que Carl Cox est "commercial". Ils n'ont jamais entendu Sasha, Alfredo, Graeme Park mais, pour eux, c'est du déjà vu. L'époque n'est tout simplement plus au love power de la fin des années 80, il faudra bien l'admettre. Je pense que les organisateurs des raves françaises ont beaucoup à répondre de cet état d'esprit. Il est tellement plus facile de faire dans le glauque que dans le glitter. À force de vouloir rester farouchement indépendantes, les raves françaises ont amené tout ce qui est noir et négatif et l'omniprésence de la techno dans cette scène n'en est qu'une manifestation secondaire. Après tout, le simple fait que pas un seul team d'organisateurs n'ait survécu aux pressions et aux disputes fratricides est une bonne preuve d'autodestruction. Comment comprendre que des organisateurs de rave puissent attirer 5 000 personnes puis disparaître dans le mois qui suit ? No future ? You bet. En fait, à chaque fois que nous allons dans une rave, nous ne voyons pas ce qui est, nous imaginons ce qui devrait être. Après toutes ces années, nous n'avons toujours pas droit à la qualité. Les déceptions successives ont été trop nombreuses. Qui a envie de se geler dans un entrepôt pour le seul amour de la pureté de l'underground ? Qui a envie d'étouffer au Rex, qui a envie d'attendre 2 heures pour entrer à la rave de FG ? Je sais très bien ce qu'on va dire : la mère Lestrade est vieille, donnez-lui une pilule. Le pire, c'est sûrement vrai et ça ne m'a jamais fait de mal. N'empêche. Qui peut être sûr que la scène a pris une bonne direction ? On a beau être naïf et croire indéfiniment au développement de la house, il y a 3 ans, quand on imaginait une rave, on pensait à quelque chose de multicolore et de positif. Aujourd'hui, on a cette idée globalement sombre et apocalyptique. C'est un symbole très évident. La rave n'est plus aujourd'hui une alternative aux problèmes que nous vivons tous les jours, elle en est la somme. La seule issue de secours reste, plus que jamais, la drogue. Et c'est vraiment très inquiétant. Peut-être que l'hiver a été trop long. Peut-être que l'esprit baléarique est parti pour toujours. Peut-être que, plus que jamais, il faut aller voir ailleurs. Mais l'esprit authentique de la house est toujours là, c'est juste que nous ne pouvons plus le voir. Il est dans l'air, autour de nous, il est dans ces disques que nous achetons et que nous n'entendons jamais dans les clubs ou les raves. Le seul travail des ravers et des organisateurs est de le capturer et de le concrétiser par des lumières, un son, une ambiance, une chaleur. Cette idée de la défonce, qui prévaut aujourd'hui, n'est pas la house. C'est juste un des aspects de son attrait. Il y a autre chose.
DIDIER LESTRADE
TRIBUNE
SI J'AVAIS 1 MARTEAU...
COMMENT SE FAIT-IL QUE LES JEUNES FRANÇAIS CHERCHENT A RESSEMBLER A LEURS PARENTS ? On entend régulièrement des étrangers se demander pourquoi la France n'a pas été à l'origine du moindre hit dance européen depuis l'époque disco. C'est vrai, en ce temps, VILLAGE PEOPLE, CERRONE et bien d'autres marchaient du tonnerre dans le monde entier et soudainement plus rien, à part quelques exceptions comme DESIRELESS et son "Voyage Voyage" euro-kitsh. Pourtant depuis l'explosion acid de 88, chaque pays européen de l'Italie à la Hollande, de la Belgique à la Suède, s'est distingué par son lot de DJs créatifs et d'allumés des studios, alors que l'on attend toujours un disque français vraiment important. C'est vrai que l'on peut facilement trouver une dizaine de raisons expliquant cet état de fait. Contrairement aux autres, la France a son propre marché du disque : les pays francophones. C'est un assez petit marché, aussi pour vivre de leur musique les artistes doivent être considérablement populaires et notamment chanter en français sur des majors qui laissent peu de place à la nouveauté (à l'inverse des labels indépendants qui malheureusement n'existent pour ainsi dire pas dans notre pays). Bien sûr, les disques étrangers vendent aussi, mais plus souvent grâce à une image forte qu'à autre chose. C'est pourquoi, le rock, devenu prétentieux et pompeux, fascine autant par ses fantasmes se rattachant aux USA : films, les cow-boys, motos, santiags... Les Français ont mis 30 ans à assimiler le rock, une culture anglo-saxonne blanche qu'ils n'avaient pas inventé. Alors combien de temps mettront-ils à accréditer la house, une culture anglo-saxonne noire et gay de surcroît ? Ici, les gens ne réagissent pas au groove et au son d'une musique, mais à son idée. Alors bien sûr, la vie est intellectuelle et demande réflexion et analyse mais la musique n'est-elle pas avant tout faite pour s'éclater et ne pas trop se prendre au sérieux ? Comment se fait-il que les jeunes français cherchent tant à ressembler à leurs parents, qu'il n'existe pas à proprement parler de culture jeune (flirts avec alcool et drogues, & d'évasion et rébellion) ? Bien sûr, les médias sont totalement apathiques, mais ce n'est pas tout. Les Français s'en foutent, tout simplement. Ils ont déjà les plaisirs de la table, la haute couture, la littérature, le cinéma et les arts, toutes les choses qui les ont rendus célèbres dans le monde entier. Alors quand ils se mettent à la musique, ce qui fonctionne plus que tout ce sont les bonnes vieilles formules vues et revues. D'accord, nous avons également une impressionnante scène alternative qui s'est lentement développée des restes du punk (on comprend mieux pourquoi le hardcore est aujourd'hui si omniprésent), mais où cela peut-il bien mener ? Comment est-il possible qu'en 93 les adolescents français, ne déparant pas de leurs voisins étrangers et ravers (cheveux longs, baskets, bombers), puissent se sentir quelque connection que ce soit avec THE DOORS et JIMI HENDRIX (le syndrome VANESSA PARADIS !). Le fait que la plupart des magasins dance spécialisés ferment pour laisser place aux chaînes type Nuggets/Fnac/Virgin et supermarchés est inquiétant mais ne suffit pas à expliquer qu'en dehors de la scène gay, il n'existe pas de culture club en France. Alors se pourrait-il que les Français n'aient pas encore réalisé à quel point les fêtes house sont devenues des endroits importants aujourd'hui ? Des endroits où les règles du monde extérieur ne s'appliquent plus, des endroits où chacun existe et communique à l'égal de l'autre, des endroits où race et barrières sociales s'évaporent pour laisser place à un état d'esprit unique et une musique mondiale. Paris a eu ses raves hardcore (quel fun !), ses quelques compilations dance et la Fnac, un label qui a bien compris l'impact de la scène british sur le reste du monde. Mais, ici, les clubs sont toujours vides et la dance est encore considérée comme une musique de ringard sans créativité, ni longévité. Après tout, ce n'est peut-être qu'une question d'éducation et lentement la situation progresse (12 après ses glorieux débuts, le rap cartonne en France et les rockers commencent enfin à se mettre un peu au funk). Mais où sont les bons DJs à être passés de dance traditionnelle à house/techno ? Même chose pour les studios et ingénieurs, la plupart savent toujours peu faire face aux exigences techniques de ce nouveau son, quant aux musiciens, leurs influences seront bien souvent plus TANGERINE DREAM ou FRONT 242 que Motown et GRANDMASTER FLASH. C'est également vrai, que le public continue d'attendre un ARTISTE sur une scène, allant voir un concert comme si c'était du théâtre alors que la house a fait table rase de tout ce cirque en faisant participer les danseurs et ne privilégiant qu'une seule chose : la musique. Le schéma est pourtant simple : le disque est bien ou il ne l'est pas, c'est tout. Le DJ y croit et le passe, le public est conquis et le fait savoir. Voilà bien la sélection la plus impartiale qui ait été donnée aux musiciens depuis longtemps, alors faudra-t-il attendre que le public français des raves sorte de son abrutissement pour qu'il se passe enfin quelque chose de MUSICAL ?
JAY REMI
DROGUERIE1
ECSTASY, PETITE ORDONNANCE POUR LA E-CULTURE
Très chers ami(e)s ravers, "science sans conscience n'est que ruine de l'âme", comme le disait il y a 500 ans un tourangeau de grand renom. Donc, par ces longs week-ends speeds et colorés où l'on s'agite dans les déferlantes sonores et autres bonheurs chimiquement altérés, ne serait-il point bon de comprendre comment fonctionne, dans nos cervelles d'oisillons, cette substance nommée MDMA ?
Peu d'études ont été menées sur les effets à long terme de cette dope vieille de 80 ans, inventée par les pharmacologistes de la société allemande Merck. Les médecins Anglais commencent désormais à y regarder de près, car on estime là-bas à un demi-million le nombre d'usagers hebdomadaires de la pilule d'amour : evil bless rav-E-culture ! Bien qu'il soit difficile, éthiquement, de donner des X à des cobayes humains, certains ravers à problèmes sont suivis médicalement par une équipe du Guy's Hospital de Londres. On commence donc à en savoir un peu plus sur l'euphorique chimie de nos chers bonbons.
(1) FONCTIONNEMENT DE LA MOLÉCULE
Après un passage plutôt délicat par le foie (le MDMA est passablement indigeste), la molécule va relancer dans le cerveau la production de sérotonine. Neurotransmetteur naturel du cerveau, la sérotonine régit d'autres neurotransmetteurs plus subtils, qui commandent aux humeurs et à l'affect. D'où le grand pouvoir émotif procuré par l'E. Lorsque la sérotonine débarque sur les synapses (les connexions entre neurones), elle va y rester pour quelques heures, bloquant le passage. Gonflés à bloc en sérotonine, les neurones voient la vie en rose.
(2) LES DANGERS DE L'E
Bien moins dangereux que l'héro et la coke, l'E ne rend pas le cerveau "junk". Mais les Anglais ont quand même enregistré, depuis 1990, sept décès d'E-Boys and Girls. Pourquoi ? La sérotonine entraîne aussi la production d'autres neurotransmetteurs, comme la dopamine et la noradrénaline. Un flot trop important de noradrénaline sur l'hypothalamus rend cette glande, qui régule les fonctions corporelles, incapable de répondre correctement au dégagement de chaleur induit par la danse. Il en résulte une hyperthermie et une accélération cardiaque qui peut-être fatale si l'extasié ne se réhydrate pas régulièrement. Outre certaines combinatoires génétiques que personne ne peut prévoir (on ne sait pas, a priori, si l'on est ou non épileptique), les principaux responsables des décès restent les patrons de boîtes qui refusent de servir de l'eau minérale et bloquent les robinets des toilettes. Refuser de l'eau à toute extasié en pleine témon peut être mortel. Tout comme l'empêcher de sortir prendre l'air. Qu'on se le dise : ces refus de commerciaux inconséquents entrent bel et bien dans le cadre de la "non-assistance à personne en danger".
Lorsque les effets de l'E se terminent, les neurones sérotoninés se vident d'un coup, avec comme conséquence ce down démoralisant assez redoutable. Rien de si grave, cependant, qui ne puisse être enrayé par un 1/4 de Lexomil, ou, mieux encore, par un bon massage. À éviter : les bains trop chauds ou trop froids. C'est plus sympa pour le cœur qui, à ce stade, a déjà beaucoup donné.
(3) L'E DÉTRUIT-IL LA CERVELLE ?
Les rats et les singes ont bien de la chance, eux que l'on gave régulièrement de fortes doses de MDMA en laboratoire. Résultat : pris quotidiennement à dose humaine (100 mg), les neurones dégustent. Certains deviennent incapables de produire de la sérotonine. D'autres voient les fibres de leurs synapses rongées, même si les cellules des neurones sont moins atteintes. Bref, si le logiciel tient le coup, le disque dur se vérole. Il s'ensuit, chez les singes (et les Poupées Duracell à 160 BPM) de sévères états dépressifs, des perturbations importantes du sommeil et un état de psychose chronique lourd à porter. S'il n'y a toujours pas de manque, on observe d'importantes dégradations de la mémoire à court terme.
Mais, personne ne sachant vraiment si les neurones sont capables ou non de se réparer, faire du MDMA un neuro-killer est hasardeux. Les fibres qu'il ronge sont susceptibles de se régénérer. Mais le gène des neurones : notre précieux bien ? Certaines études prouveraient que le MDMA attaque les gènes des neurones. Résultats contestables : ces essais, réalisés in vitro, utilisent des doses que n'atteindra jamais le plus barré des ravers, même avec cinq E dans le sang !
En conclusion, l'E n'est pas franchement une drogue récréative et innocente. Elle peut être dangereuse. Tout dépend des circonstances : déshydraté et mal entouré, ça peut mal tourner. Comme le LSD, l'E agit sur les émotions, le rappel des souvenirs, les humeurs, l'appréciation de l'environnement. Si quelque chose de pas cool vous turlupine le cervelet quand vous gobez, mieux vaut être bien entouré, et ne pas prendre la chose seul. Après tout, l'E n'est-il pas avant tout rituel communautaire ?
NOMBRE DE DÉCÈS DUS À LA CONSOMMATION DE DROGUES EN FRANCE POUR L'ANNÉE 1992 :
CANNABIS : O
LSD : O
AMPHÉS : 2
E : non évalué
COKE : 4
HÉRO : 153
ALCOOL : 30 000
TABAC : 110 000
TÉLÉVISION : ?
DR LA CHAMPI
DROGUERIE2
LA NATURE EST EN NOUS
Pourquoi parler santé dans un fanzine house ? Tout simplement parce que la house chante la paix et l'harmonie pour le corps et l'esprit, et que ce message est en rapport direct avec notre bien-être physique et spirituel. N'oublions pas, non plus, que nous sommes un tout : notre corps et notre esprit sont liés. Nous sommes ce que nous pensons. Alors essayons de penser positif, même lorsque cela semble impossible, et donnons à notre corps ce qui est bon pour lui. Il ne tient qu'à nous de savoir tirer le meilleur de la nature. Commençons donc par consommer le GUARANA. Cette plante précieuse, connue des Indiens d'Amazonie depuis des temps anciens, possède une action dynamisante sur l'activité intellectuelle et physique. Autant dire que ses effets sont ceux d'une véritable amphet naturelle. Il est bon d'en prendre en cas de fatigue, de baisse de tonus ou avant un effort physique ou intellectuel prolongé. Attention n'achetez pas n'importe quelle poudre, certaines marques vendues en pharmacie sont chères et faiblement dosées, il faudrait avaler la boîte entière pour en ressentir les effets ! C'est pourquoi je vous indique l'adresse d'une épicerie brésilienne, où on trouve des boîtes de Guarana en poudre à 82 F les 100 g. Le meilleur rapport qualité prix que l'on puisse trouver !
Panier de la Mouffe, 46, rue Daubenton 75OO5 Paris.(inédit) Voici donc la liste de ce dont on peut abuser, sans risque de mauvais trip, de descente ou d'OD... Je commence par les oligo-éléments. Ils viennent de l'eau, du sol et des plantes... Et chacun d'eux est indispensable et a une action spécifique.
ALUMINIUM : lutte contre certaines insomnies et trouble de la mémoire.
CALCIUM : traitement de la spasmophilie et remède des problèmes de décalcification et des affections osseuses et dentaires.
FER : sans lui le sang ne peut plus transporter d'oxygène et les cellules ne parviennent plus à se nourrir. C'est dire s'il est important (avis aux gobeurs !).
MAGNÉSIUM : indispensable à l'assimilation des aliments. Anti-inflammatoire et allergique. Il stimule la destruction des microbes par les globules blancs. Enfin, c'est un régulateur de l'humeur !
ZINC : grand régulateur de l'hypophyse. C'est-à-dire qu'il participe à d'innombrables réactions métaboliques. Indispensable à la bonne marche de la digestion. Il agit sur notre équilibre nerveux.
LITHIUM : traitement des troubles psychiques (anxiété, angoisse...). Se trouve en boîte d'ampoules à 12,50 F, pas de quoi se priver !
Tous ces OE se trouvent en pharmacie et magasins diététiques.
JUDITH
DROGUERIE3
eMOVIES
Dans les années 60, le rock psychédélique engendrait toute une ribambelle de films remplis de hippies sous LSD. Du très acid "Tommy" aux trips mortuaires d'"Easy Rider", il est quasiment impossible de dénombrer tous ces films cultes sur la drogue. Et en 1993, voit-on au cinéma des ravers gober des kilos d'ecstas ? Pas encore, mais ça ne devrait pas tarder. Et c'est par le court-métrage que nous arrivent les tout premiers E-movies. Avec 2 joyeux délires d'outre-Manche (comme par hasard!) qui ne font aucune concession et vont bien plus loin qu'un provocateur mais vite rasant "drug movie". Tout d'abord "Weekender" d'un certain Wiz, qui signe là sa première œuvre et que l'on a pu voir dans le Party Zone du 1er de l'an. On assiste à la virée de fin de semaine d'un ado très porté sur les joints et le poppers. "J'ai voulu faire le "Saturday Night Fever" de notre génération" déclare Wiz (22 ans) dans i-D. Mission accomplie si quelques fautes de goût ne venaient pas émailler ce court-métrage : les hallucinations de notre héros franchement stoned sont un peu lourdes et le choix de FLOWERED UP pour la musique n'est pas une des meilleures idées. Mais ne boudons pas : Weekender est un premier pas relativement positif et on attend de voir la prochaine production de Wiz. L'X d'or revient haut la main à Richard Heslop et son envoûtant "Floating" à haute teneur hallucinogène. Soit un délire de 39 mn comme on n'a souvent l'occasion d'en voir (à moins de rester scotché sur Canal+ à 3HOO du matin !) Imaginez une famille genre les Simpson version anglaise et HLM : le père est chauffeur de bus, la mère nymphomane, le fiston gobe des ecstas avec sa copine mutante. Quant aux deux pestes de sœurs, elles adorent JASON DONAVAN et foutre le feu au petit vieux d'à côté. N'oublions pas la grand-mère déconnectée qui joue du soir au matin d'étranges comptines sur son banjo. Tout ce petit train-train, déjà sérieusement déjanté, va basculé dans le délire le plus total car le père, persuadé que le déluge arrive, s'obstine à construire une Arche de Noé dans l'appartement. Totally weird dans un pur esprit Lynch, "Floating" bénéficie d'une excellente bande-son où s'entrechoquent des ritournelles de THE ORB et des clins d'œil house. Comme dans une scène particulièrement gore, où le père, le cœur à l'air, entend une voix lui susurrer : "Feel the rhythm of your heartbeat...". "Floating" est sans contexte LE premier véritable film de la rave génération. Avec ses séances d'hypnose et ses subliminaux ("La contre-nature en ecstase !"), Richard Heslop est en passe de devenir le Lars von Trier de la House Nation. À suivre de très près.
DAVID FONTEYNE
LABEL1
GUERILLA RECORDS
Dick O'Dell travaille dans les sillons depuis une bonne dizaine d'années. Patron du label Y Records, il manage des « ladies punk group » et des « reggae female artists » au début des années 80. Il devient le manager de TORCH SONG, par qui il rencontre WILLIAM ORBIT dont il s'occupe depuis. Avec BASSOMATIC d'une part, mais aussi en fondant le label Guerilla. BASSOMATIC signe chez Virgin et Guerilla attend son heure avec un 1er simple, l'Intoxication de REACT 2 RHYTHM et ses remix de LEFTFIELD. Progressive house ? « Le terme reste avant tout médiatique et le DMC est son inventeur. C'est un nom de +, alors que notre musique correspond + aux qualificatifs Dub House Disco (c'est le nom de leurs compils). House parce que c'est notre fil conducteur, dub pour le West London dans lequel sont situés nos locaux, un quartier très influencé par le reggae, et disco puisqu'après tout cela reste de la dance music qui existe depuis la disco. » Toutes ces références se retrouvent dans les discographies avec lesquelles les groupes du label ont grandi : « D.O.P., DRUM CLUB ou SPOOKY écoutent la même musique, de LEE PERRY à l'indie ou au glam en passant par DONNA SUMMER. » Alchimie que l'on retrouve en studio où les groupes guerillesques aiment à travailler ensemble : forts de leur culture musicale, les groupes se défendent lorsqu'on qualifie leur musique de « blanche ». « Pour mémoire la house vient de Chicago et fut longtemps exclusivement black ; Londres bénéficie d'une grande intégration raciale qui entraîne une culture internationale, contrairement aux States. DJ PIERRE m'expliquait que tout était beaucoup plus ségrégationniste là-bas. Les blacks ont leurs clubs, leurs radios et tout est ghettoïsé. Par exemple c'est à Londres qu'il a découvert LEE PERRY, qu'il ne connaissait pas... »
Guerilla est donc un carrefour musical où les artistes expriment librement leurs préférences. On retrouvera cette ouverture d'esprit qui caractérise Dick O'Dell et ses choix musicaux sur un nouveau label : O, consacré à l'ambient. « Avec quelques vocaux et d'éventuels remix, mais de l'instrumental surtout. » Beau programme et ce, dès le mois de mai.
PHILIPPE LAUGIER